Deux ans avant le changement de siècle, un comité dirigé par Jean-Jacques Aillagon, alors directeur du Centre Pompidou, reçut la charge d’imaginer les cérémonies de célébration du millénaire. Curieusement je fus convié à participer à la réflexion.
Les propositions que je fis alors, visiblement en décalage complet avec les attentes implicites des commanditaires, furent systématiquement écartées. Ma première proposition, notamment, jeta un grand froid dans l’assemblée. Prenant en compte le fait qu’un tel événement serait célébré et observé par la planète entière, il importait d’émettre un signe fort à la face de l’humanité, toujours sensible à l’image des Lumières, de la révolution et des droits de l’homme, attachée à la France. On ne saurait se satisfaire des feux d’artifice à la symbolique troublante et autres festivités qui en diraient trop peu sur la vision que nous aurions d’un futur si proche.
J’avais donc proposé de lancer un appel au peuple pour la réécriture des paroles ambiguës de la Marseillaise. Le nouveau millénaire consacrant la réduction de la planète aux proportions d’un village, sinon d’un hameau global, je pensais qu’il convenait de reconsidérer les relations de voisinage. Nous avons trop clairement oublié ce que le sang des autres, nos prochains, nos proches, aurait de suffisamment impur qu’on se proposât d’en abreuver nos sillons, et de prendre les armes pour cela.
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