Le cafard de la pleine Lune

Il est des images troublantes, non par leurs propriétés esthétiques mais parce qu’elles font osciller, dans l’esprit du regardeur, le « ça a été » de Barthes, entre doute et certitude. Mais aussi parce qu’elles sollicitent la suspension de notre incrédulité là où la science devrait faire foi, de droit. Parmi celles-ci, les images de la mission Appollo 11 sont exemplaires. Qu’est-ce qui fait la force d’une empreinte de botte de caoutchouc dans le sable pierreux ? A la fois ce que l’on sait du contexte de prise de vue (une trace manifestement humaine sur le sol vierge de la Lune) et ce que le doute nous fait craindre la valeur de témoignage du document.

Et si l’observation attentive de la photographie nous permettait de découvrir ce que le marcheur sélénite ne pouvait voir pour l’avoir foulé allègrement du pied, cherchant ailleurs une excitation plus grande. Quand la camera regarde la terre de Lune, celui qui a été là, le nez en l’air, regarde peut être la notre. On peut imaginer que ce n’est pas la distance qui étreint le cœur mais la conscience de cette distance : voir la Terre flotter dans le ciel et garder les pieds sur terre.
Et si le nez au sol on découvrait une trace de vie, discrète, insidieuse, un insecte, un cafard peut être ?
Et si cette trace de vie nous était suffisamment familière pour que l’on puisse soupçonner l’avoir apportée dans nos bagages, sous nos semelles ?
Et si c’était ici l’indice qui fait vaciller l’authenticité du document qui, comme le prétendent certains, proviendrait du savoir faire habile d’un studio hollywoodien ?
Et si, encore, ces espèces qui survivent sur terre depuis 400 millions d’années, qui peuvent vivre sans manger et boire pendant un mois, sans tête pendant une semaine, avaient déjà colonisé notre satellite confirmant, nonobstant le drapeau qui flotte sans vent, que nous ne serons probablement jamais les premiers ?
Quelques pixels de doute dans l’océan des Certitudes.

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